samedi 14 décembre 2013

Semaine 11 : Rufino - Mendoza

Enfin Mendoza ! Apres 1200 km de Pampa, dont 700 cette semaine, nous voilà arrivés aux portes des Andes, à quelques dizaines de kilometres de l'Aconcagua et de la frontière chilienne ! Les vélos commencent à souffrir mais le moral est plus haut que jamais. Retour sur cette semaine qui, du point de vue des paysages de la météo et des rencontres, nous en aura fait voir de bien belles !


Petit bug entre "B" et "C", le chemin était bien sûr... tout droit ! 



Rufino, jour de tempête. Ça nous arrange pour bloguer dimanche dernier, un peu moins pour avancer. Nous restons bloqués toute une journée et une nuit (meilleure nuit) dans le terminal d'omnibus, et dans sa salle d'attente, qui n'a jamais aussi bien porté son nom. L'été rime ici avec grosses pluies: les trompes d'eau, les 40 cm dans les rues et les rafales de vent nous empêchent de mettre le nez dehors. A la première éclaircie le lendemain, nous mettons les voiles ! Au cours de la semaine, nous passons plusieurs fois entre les gouttes et  jouons à cache cache avec les cumulus, mais la pluie nous a souvent rattrapé en fin de journée.



La Ruta 7 :  Et ça continue, encore, encore C'est que le début d'accord d'accord 



On nous avait prévenu, la température peut monter rapidement au milieu de la Pampa ! Les gourdes se vident plus vite que jamais. L'avantage c'est qu'on peut boire du Maté sans sortir le réchaud.



Depuis notre départ de Buenos Aires il y a douze jours, nous campons la plupart du temps dans les nombreux espaces verts des villes que nous croisons, toutes distantes d'au moins 40km. Ici le camping sauvage en quasi centre-ville ne pose aucune difficulté bien que les locaux nous rabrouent les oreilles avec les questions d'insécurité. Les morts dans les émeutes de Córdoba et dans la banlieue de BA alimentent leurs craintes et ils nous disent sans arrêt de nous méfier de la ville suivante ! Le reste du temps, c'est l'hospitalité des argentins qui nous permet de dormir sous un toit : gare routière, pompiers volontaires (cf ci-dessus! ), club sportif ou simplement (ou pas) chez l'habitant !



Courrez-vite chez votre libraire acheter la nouvelle édition du "el Vivir y el Sentir del camionero", un grand succés sur la Ruta 7 ! ( photo du mur de sombres toilettes de station service, lieu privilégié pour remplir nos gourdes) 



La pampa est le poumon agricole de l'Argentine. Les 800 premiers km de Ruta 7 coupent en deux des milliers d'Ha de soja, maïs, blé et autres céréales espacés par d'immenses prairies à bovins. Le maître mot est "rendement" ! Les OGMs ne se cachent pas et les publicités 4 x 3m pour des semences miraculeuses finissent par choquer nos petits yeux d'européens un chouïa sensibles à l'écologie.



De même qu'hier et avant hier et avant avant hier nous avançons à notre vitesse de croisière sur la Ruta 7, notre route 66 à nous. Aucune feinte par des petites routes n'est possible à moins de faire des dizaines et des dizaines de km de pistes plus ou moins sablonneuses et pas tellement plus peuplées que la Siete. Heureusement, le vent, lorsqu'il n'est pas favorable est au pire plein travers et non de face, auquel cas la traversée aurait pu prendre un mois ! Et nous n'avons même pas sacrifié Iphigénie... Le désert humain est parfois dur pour le moral, croiser une ou deux villes par jour, c'est peu ! Mais les routiers, du haut de leurs cabines spacieuses continuent à nous soutenir à coup de klaxons et de pouces levés. A tous les camioneros, merci à vous, nous tâcherons d'oublier ceux qui ont failli nous envoyer au paradis des cyclistes...



Les bords de notre route favorite sont jonchés d'animaux morts en tous genres. Ci-dessus un python de 15 mètres...8 mètres... 2 mètres... un bon 40cm ! Gros zoom à l'appui.



Rien de tel que le canal (des égouts ?) de Las Cetitas pour se raffraichir un bon coup après 100 bornes de vélo. Enfin, ça, c'est selon Alex. Respect. Promis, on vous tient au courant de l'apparition ou non de plaques sur la peau. Mais après les termes de Moulay Yacoub, il ne peut franchement rien nous arriver !



Pablo, végétalien de 60 kg à la tente de 0,8 kg est le premier cyclo-touriste que nous croisons sur les routes argentines. A côté de son matériel et de son physique de latino, l'Eldorado à vélo est un déploiement de l'US Navy. En plus, c'est un autochtone, chose rare car les Argentins ont plutôt tendance à délaisser leur pays pour les vacances. Nous partageons un repas (dont il conserve la moitié sans doute pour les 5 prochains jours...) et une nuit ensemble avant de nous quitter, lui allant vers Buenos Aires, nous vers Mendoza. C'est le fameux problème des 2 trains qui partent au même moment de 2 gares distantes de 1200km. Sachant que l'un parcourt 120km par jour et le second 50, à quel endroit se croiseront-ils ? "Autour d'une grosse bière !" "Non non Vianney, lis bien, le type, c'est un ascète !"



10ème jour de Pampa : "Comment vas tu petit vélo ? Écoute, moi ça roule mais je commence carrément à me faire ch... sur la Ruta 7. T'en penses quoi ? Qu'il faudrait arriver au bout pour que tu puisses te dérouiller un peu le guidon ? Je suis bien d'accord." Corneille et Racine ont dû être cyclo-touristes dans leurs jeunesses. Rien de tel pour s'exercer au monologue. On fait aussi passer le temps en faisant converser les deux hémisphères de nos cerveaux, les cornes droite et gauche du guidon avec le rétroviseur, ou encore la figurines de Batman made in Maroc avec tous les souvenirs (cailloux, pelote de coton, croix, noix de Thomery...) qui habitent la sacouille ! Quand les autres roulent à fond devant, on est pas si seul en fait.



Les priorités de chacun: écrire le carnet de bord ou manger. Rien à voir, mais après x journées à camper, le carrelage d'une salle des fête d'un poligone deportivo (club de foot) est doux comme du velour. "Avec mon duvet je pense que j'ai fait la poussière d'un bon tiers de la surface." Alex au petit matin est très content que son corps puisse enfin rattrapper son quota de roulades nocturnes impossibles en tente...



Nos trois voyageurs aux côtés d'une belle inconnue, tombée complétement par hasard sur la photo. Derrière, on appercoit un morceau des salons du club de foot de San Luis, transformé en auberge de SDF pour la nuit. La gérante, Dorita une femme comme on en fait plus, et qui malheureusement n'apparaît pas sur la photo, nous en a ouvert les portes en début de semaine, afin d'échapper une fois de plus à la tempeta de fin de journée !

  ¡ Muchisimas gracias Dorita !



L'Argentine, c'est un grand melting pot autant lorsque l'on parle de la population que des coches, des autos, des voitures. Ici les grosses Dodge croisent les braves Peugeot 504 ; les gentilles petites Fiat doublent les vieux 4X4 Ford ; les Cadillac de 4m de long klaxonnent les camions rouillés des fermiers. Le tout donne aux villages argentins un petit air de GTA (avis aux connaisseurs) ! Heureusement, pour l'instant, point de fusillades devant nous. 



Un petit bain de boue pour le père Vianney qui commence à péter une pile sous le soleil argentin. C'est tellement plus drôle par en dessous du pont. "Ah, mais il est mou ce fleuve ! ah zut, le compteur y est resté lui aussi... "



Quand Vianney s'improvise coiffeur avec du matos de pro -la paire de ciseaux du couteau suisse- les pattes d'Alex n'ont plus qu'à trembler. Le sourire c'est avant de se regarder dans le rétro !



La tête à l'envers, Alex essaie de se souvenir de ce que ça fait d'être en Europe. Question d'équilibre il paraît. Plus que 250 km avant Mendoza, c'est pas le moment de craquer. "Alex, la récré est finie, allez, on s'y remet."



Les dernières nuits sont particulièrement mauvaises à l'approche de Mendoza. La chaleur d'un climat lourd que les orages viennent alléger tous les trois jours est étouffante sous la tente. La tente "une place" devient le luxe auquel nous avons droit toutes les trois nuits, roulement oblige. Au Maroc, c'etait exactement le contraire; l'heureux locataire de la chambre simple risquait de mourir congelé ! Dans l'autre tente, alors que la bonne odeur de moisi est plutôt tenace, la grosse toile foncée (bien utile par le passé) fige le thermomètre au dessus de trente...on se dit donc que la prochaine nuitée sera à la belle ou ne sera pas ! Comme on a quand même besoin de sommeil on réussit à se faire inviter à Las Cetitas (100 bornes de Mendoza) chez Gaston (le 2ième si vous suivez bien) chez qui nous squattons la petite cour intérieure que surplombe une belle vigne. La nuit s'annonce parfaite. Comment peut on mal dormir dans un tel cadre ? Mais l'enfer est pavé de bonnes intentions, et c'est finalement les yeux bouffis de mauvais sommeil que nous nous levons au petit matin. Le tapage nocturne a commencé vers minuit : de la musique venant de toute part, des cris, des pétarades, des courses de voitures, des moteurs que l'on fait ronronner et des moustiques par milliers pour couronner le tout rendent impossible le moindre repos. On se regarde avec Vianney après les chassés croisés des dernières heures : "oh la belle nuit de m***e !" Et notre hôte si sympathique au premier abord qui commence à réclamer 500 pesos ( +/- 50€) pour la nuit ... On se fâche, il ne résiste pas et nous débarrassons les lieux sur une porte qui claque. Dommage ! 



Plus les saisonniers sont sales et édentés, plus ils sont cools. Après une petite tracte, Alex, (le pro du moindre effort dés qu'il peut s'accrocher à un camion, surtout en fin de semaine) salue ses nouveaux potes très amusés par notre petit peloton et surpris qu'on ait décliné l'invitation à monter !



Le comité d'acceuil pour notre arrivée à Mendoza... Une fois de plus, ca n'a pas manqué, fin de journée, grosse drachée ! Petit plaisir tout de même : appercevoir les sommets des Andes au loin (absentes de la photo on vous les garde pour la semaine prochaine) ; suite au prochain numéro !